Non, le gouvernement n’est pas à vendre !

Par ABDELHADI ALAMI
Ce qui est en train de se passer, ces jours-ci, sur le champ politique au Maroc est inquiétant. Les tractations n’en finissent pas pour la formation du prochain gouvernement. Elles connaissent même un «blocage» patent en raison des conditions émises par les unes et les autres parties. Certaines de ces conditions sont tout simplement indécentes car on n’a jamais vu, dans les précédentes expériences, un parti réclamer le quart ou le tiers des portefeuilles ministériels à pourvoir au moment même où il ne dispose que d’un nombre limité de sièges au Parlement. Il n’est pas acceptable, non plus, qu’un parti prétende comptabiliser dans son escarcelle les sièges parlementaires d’une autre formation politique et se prévaloir ensuite d’être le plus fort au lendemain d’une alliance tactique de circonstance, organisée dans l’unique dessein d’entrer au gouvernement.
C’est ce genre d’anomalies choquantes que le Souverain a pointées dans son récent Discours de Dakar, à l’occasion du 41ème anniversaire de la Marche Verte : «la formation du prochain gouvernement ne doit pas être une affaire d’arithmétique où il s’agit de satisfaire les desideratas de partis politiques et de constituer une majorité numérique, comme s’il était question de partager un butin électoral». Tout est dit !
Nous attendons, le Maroc entier attend des partis qui ont été approchés par Abdelilah Benkirane qu’ils exposent devant le Chef du gouvernement des programmes cohérents, responsables et fédérateurs. Qu’ils déterminent les priorités à court terme. Qu’ils travaillent vite et bien de sorte que l’Exécutif fonctionne d’une manière efficace et pleinement opérationnelle. Nonobstant leur couleur politique et leur idéologie, ces partis sont censés proposer des compétences incarnées par les meilleurs technocrates qui existent en ce moment dans leurs rangs. Des cadres qui maîtrisent évidemment très bien leurs secteurs. S.M. le Roi a bien souligné l’importance de ces critères : «le gouvernement est une structuration efficace et harmonieuse qui s’adapte au programme et aux priorités. C’est un ensemble de compétences qualifiées, avec des attributions départementales bien définies». En d’autres mots, la formation du prochain gouvernement doit se faire conformément à ces critères et suivant une méthodologie rigoureuse.
Nous restons sur notre inquiétude avec le sentiment – largement partagé – que nos formations politiques ne disposent pas d’une vision à 360 degrés qui permette d’entrevoir un gouvernement réactif, homogène, voué à l’intérêt supérieur du pays et de ses institutions plutôt qu’à la chasse aux portefeuilles ministériels et aux privilèges qui y sont associés… L’image que ces partis renvoient aux Marocains, en ce moment, est celle d’une affligeante vente aux enchères – et au détail – du gouvernement. Non, le Maroc n’est pas à vendre !