Par HASSAN EL ARCH
Directeur de la Rédaction
direction@letempsmag.ma
C’est la gueule de bois nationale, depuis le jeudi 21 octobre. On est sous le choc. On est en colère. On est dépité. Le gouvernement punit le tiers des citoyens non encore vaccinés. Une punition. Il n’y a pas d’autres mots. Le «Pass Vaccinal» obligatoire est l’instrument de cette correction massive que nos décideurs nous infligent sans préavis. Il fait très fort, cet Exécutif. Le 7 octobre, il est nommé. Le 21 octobre, il sévit avec un mode opératoire invraisemblable.
Le gouvernement entame sa mandature en prenant une décision non pas impopulaire (ce serait un euphémisme), mais absurde : priver, du jour au lendemain, des millions de citoyens de leur droit constitutionnel à la liberté de mouvement. Les trois partis victorieux aux dernières élections ont fait banco dans les deux Chambres du Parlement et forment, de ce fait, la majorité gouvernementale. Cette coalition a vite trouvé le moyen de remercier les millions d’électeurs qui lui ont offert la victoire historique au scrutin du 8 septembre : les traiter comme des mineurs, insulter leur intelligence, leur infliger un «reconfinement à l’extérieur». Accorder un délai raisonnable d’un mois aux récalcitrants et autres indécis n’était peut-être pas dans la culture citoyenne de ce Cabinet. Non. Il fallait frapper fort et tout de suite. Verrouiller «fissaâ». Marquer les esprits.
On gobe les chiffres qu’on nous sert chaque jour en pâture avec un arrière-goût désormais amer. Ces chiffres nous disent qu’à la date d’hier, dimanche 24 octobre, 23.662.317 concitoyens ont reçu leur 1ère dose et sont devenus correctement vaccinés. Un môme du CE1 fera rapidement le calcul pour établir qu’aujourd’hui, 10.337.683 personnes n’ont pas leur «Pass Vaccinal». Cela représente plus d’un tiers des sujets concernés par la campagne nationale de vaccination. Toute une partie de la population frappée d’infamie depuis le 21 octobre ! Effet immédiat : les gens se ruent actuellement sur les centres de vaccination dans une frénésie qui sature les capacités d’accueil. Sans parler du black-out intermittent, en fin de semaine écoulée, sur la plateforme «liqahcorona». Fallait-il s’attendre à autre chose depuis le jeudi dernier ? À ceci peut-être : des clusters viraux qu’une telle cohue pourrait bien favoriser, à Dieu ne plaise.
Et pour finir, la preuve de la gabégie en question : le ministère de la Santé s’est fendu d’un communiqué annonçant qu’à partir de ce lundi 25 octobre, la prise de la 1ère dose de vaccin est assortie (récompensée, en fait, si l’on se met dans la disposition d’esprit qui convient) par un «Pass Vaccinal» provisoire. On gère le pays à la va-comme-je-te-pousse… En bon dialecte marocain populaire, cela s’appelle «Tkharmiz».
On sort. On regarde. On écoute. On parle aux gens. On prend leur «température morale». Et ce qu’on en garde tient dans cette évidence : les Marocains ne sont pas contre le «Pass Vaccinal»; ils sont contre la brutalité de sa mise en œuvre ! Le gouvernement commence à perdre une grande part du respect dont il a été crédité à sa nomination. Pour la confiance, c’est une autre histoire maintenant…
