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EDITO

QUESTIONS

PAR HASSAN EL ARCH

Les questions rhétoriques sont rarement innocentes. Même si elles paraissent superfétatoires dans les débats qu’on engage, elles se posent et s’imposent par la force de l’actualité. Par la quantité de questionnements que celle-ci charrie chaque jour… Et des questionnements, il y en a eu des masses au cours d’une pause estivale  qui n’aura ressemblé à aucune autre, de mémoire de Marocain !

Pourquoi avons-nous sombré, depuis le début d’août, dans les statistiques de la morbidité ? La courbe épidémiologique avait été bien gérée depuis mars, valant alors pour le Maroc des congratulations à l’international, avant de faire exploser le compteur, à la veille de l’été. Nous avons largement franchi la barre du millier de morts et le second millier se profile avec bientôt 70.000 cas cumulés. Nos bilans quotidiens ne se chiffrent plus par dizaines, ni même par centaines, mais par milliers depuis plusieurs jours. Nos hôpitaux sont sous pression. Notre personnel soignant aussi. Ainsi que notre Police. Et nos enseignants. Et nos enfants. Et nos proches. Et nos collèges. Et nos consciences, tous autant que nous sommes.

Pourquoi le gouvernement a-t-il autorisé la célébration de l’Aïd Al Adha ? L’extraordinaire promiscuité dans les souks et le raz-de-marée de contaminations qu’elle a amené resteront dans les annales. Le monde agricole a été sauvé parce que le cheptel s’est finalement bien vendu. Grand bien lui fasse ! Tant mieux pour les fellahs. La bulle covidienne a éclaté comme prévu dans la semaine qui a suivi, et alors, on n’a jamais dénombré autant de nouveaux cas, de décès et de cas critiques que depuis l’Aïd Al Adha.

Pourquoi nos plages ont-elles été rouvertes dès le début du déconfinement ? Pour être refermées, deux mois plus tard, le temps pour le virus de travailler à plus large échelle. Les sites balnéaires n’ont jamais connu affluence aussi fébrile, ni attroupements aussi sauvages. Le gel désinfectant, le port du masque près de l’eau, la distanciation sociale sur le sable, tout cela est une vue de l’esprit ! Cela a coûté au pays une poussée supplémentaire de coronavirus. On referme des plages. Fallait-il les rouvrir avec des indicateurs viraux dans le rouge ?

Pourquoi ne sévit-on pas assez contre les fossoyeurs de la crise ? Ils sont légion, ils sont partout, ils font peu de cas de la misère de leurs concitoyens en ces temps difficiles… L’employeur qui n’a aucun complexe à demander à sa secrétaire en arrêt de travail la rétrocession d’une partie de ses indemnités de sécurité sociale. Le restaurateur qu’on menace de fermeture pour non respect des règles sanitaires, mais qui se met en colère parce qu’il va perdre du chiffre alors qu’il servait gracieusement des repas aux soignants et agents de l’ordre au début de l’état d’urgence… La science du comportement a un nom qui colle au schéma : ça s’appelle de la nécrophagie.

Pourquoi ce fossé aussi abyssal quand il s’agit d’indemniser les personnes ayant perdu leur emploi à cause de la crise ? Des centaines, des milliers de salariés sont sur la paille aujourd’hui. Ils ont juste les yeux pour pleurer. Des familles ont vu leur revenu s’effondrer quasiment en six mois. A l’autre extrémité du spectre, des pilotes remerciés avec des indemnisations de 4, 5, voire 6 millions de DH. Tant mieux pour eux. L’Etat a ses moments de générosité. Le tout est de ne pas perdre les… bonnes manières.

Et pour l’«anecdote» : pourquoi certaines protagonistes du procès «Hamza mon BB» n’ont-elles pas encore bénéficié de l’hospitalité carcérale ? Le tribunal de Première instance de Marrakech, souvenons-nous, a condamné, dans la nuit du 29 au 30 juillet, la dénommée Dounia Batma à 8 mois de prison ferme, dans le cadre de cette affaire. Sa sœur Ibtissam ainsi que les dénommées Aïcha Ayach et Sophia Chakiri ont écopé de peines respectives de 1 an, 18 mois et 10 mois de prison. Voir les choses ainsi traitées en mode deux poids et deux mesures équivaut à décréter qu’il existe en 2020 des Marocains «Premium» et des Marocains «low-cost» !

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