C’est mathématique, rien à voir avec le «mektoub» !

PAR HASSAN EL ARCH
Comme on l’admet dès le préambule de notre dossier central, l’allusion du titre choisi pour notre couverture paraîtrait aux uns provocatrice sur les bords, mais la question posée est bien évidemment rhétorique. Qui voudrait, en effet, d’un reconfinement ? Qui imaginerait se refermer de nouveau entre quatre murs et une infinité de tourments, les uns bien réels, les autres imaginaires ? Qui s’y projetterait, ne serait-ce qu’en pensée ? C’est pourtant une éventualité. Il faut être aveugle ou naïf pour l’exclure. Parce que la loi des probabilités est sans appel : à force de tenter le diable…
Dr Imane Kendili, psychiatre et addictologue réputée, a signé dans ce numéro une chronique pleine de (bon) sens. Elle nous rappelle, entre autres, que «la peur est passée par là. La peur de mourir, s’entend. Car celle-ci reste ancrée et ne nous quitte plus jamais. Et comme aucune garantie n’est permise pour l’après-virus, les tics et les tocs auront d’autres visages. On parle des effets psychologiques à moyen et long termes, le stress post-traumatique, la dépression, l’anxiété, l’insomnie». Allez donc comprendre le pourquoi du comment en regardant avec quelle légèreté beaucoup de nos concitoyens snobent le coronavirus.
Les médecins nous le disent. Les décideurs politiques nous le rappellent. Jusqu’à notre propre subconscient qui nous le ressert à longueur de journée et de nuit : le spectre d’une deuxième vague n’est pas loin. Tout se passe comme si le relâchement constaté depuis quelques jours était une légende urbaine ! On est effaré de découvrir qu’il y en a même qui ne croient pas du tout à la «Covid-19», qui pensent que toute cette pandémie est un canular colossal et que le «mektoub» seul détermine qui crèvera de quoi, quand et comment…
Quoi qu’il en soit, quel gâchis ! Tous ces efforts dépensés, ces sacrifices consentis, cette énergie surhumaine jamais déployée de mémoire de Marocain, tout cela joué à la roulette sur la dernière ligne droite avant la sortie du tunnel. Coup de poing sur la table d’El Otmani, coup de gueule de Laftit, coup de sang d’Aït Taleb, les trois hauts responsables sont montés au créneau, en début de semaine et en ordre dispersé, pour dire aux Marocains que l’on est en train de franchir le rubicon. Et que l’Etat sera contraint de sévir bientôt si le relâchement s’aggrave. Contre les personnes à comportement déviant, certes, mais aussi contre les entreprises laxistes.
«Wa Baraka !», hurlait presque, ce matin, mon chauffeur de taxi. Il fait, bien sûr, le lien de cause à effet et ne comprend pas comment l’être humain a souvent des velléités quasi-suicidaires. «Demain, le coronavirus reviendra. Oui, car rien ne nous garantit qu’il ne reviendra pas, encore plus virulent, encore plus meurtrier !», s’alarme l’auteure de notre chronique. Espérons que le scénario ne se réalisera pas et que le Maroc fera l’économie d’un cauchemar qui, pourtant, se dessine au fil des jours, si les clusters viraux continuent d’éclore… C’est mathématique. Et ça n’a rien à voir avec le «mektoub» !