Web
Analytics
EDITO

Sprinter ? Coureur de fond !

Par HASSAN EL ARCH

Directeur de la Rédaction

direction@letempsmag.ma

Ministre de la Justice et Secrétaire Général du PAM (Parti Authenticité et Modernité), Abdellatif Ouahbi est un poids lourd dans le paysage politique national. Risquerait-il de devenir un boulet dans l’architecture de l’Exécutif ? La question pourrait interloquer. Voire choquer. Mais ceux qui suivent de près les faits et gestes du team Akhannouch, depuis son investiture le 7 octobre 2021, s’accordent sur une réalité : le patron de la formation PAMiste n’a pas la langue dans sa poche et n’hésite pas à ruer dans les brancards, quand il s’agit d’appeler les choses par leur nom. Aziz Akhannouch ne l’ignorait évidemment pas en lui proposant, fin 2021 (en même temps qu’à Nizar Baraka, de l’Istiqlal), l’alliance qui allait donner au Maroc une majorité gouvernementale inédite.

Mais le tempérament «frondeur» d’Abdellatif Ouahbi, auquel se sont d’ailleurs tôt frottés les avocats, à leur détriment, en pleine crise sanitaire, tient plus de la course de fond que du sprint… Brillant avocat, c’est un juriste émérite qui n’était, semble-t-il, pas très tenté par une charge ministérielle. La pression du Bureau politique de son parti a fini par le porter au ministère de la Justice. Il a signé, le 6 décembre, le fameux «Pacte de la Majorité» avec Aziz Akhannouch, adoubé Chef du gouvernement, et Nizar Baraka, arrivé troisième au scrutin législatif.

Dans le mot «Pacte», il y a des notions comme «accord», «entente», «harmonie», «solidarité»… Cette dernière notion, sans doute la plus sensible entre toutes, n’a qu’une seule et unique traduction, en l’occurrence : éviter les clashs et respecter le principe de cohésion gouvernementale. Près de huit mois après le bilan des urnes, quelques individualités fortes, dans la dream team d’Akhannouch, secouent le cocotier à l’occasion et ne se privent pas d’embarrasser, de temps en temps, le porte-parole du gouvernement. Abdellatif Ouahbi en fait partie; il n’est pas seul. Khalid Aït Taleb, son collègue à la Santé, ramait consciencieusement à contre-courant au plus fort de la vague virale. Il «se payait» parfois les médias et les députés avec une arrogance qui n’avait d’égal que son ignorance de la mentalité de la rue marocaine.

Plus soft, le style de gouvernance d’autres membres du Cabinet Akhannouch a permis aux titulaires en question de passer les tests de popularité sans encombre, ni… gloire, non plus. Nul collectif n’est parfait. Comme dans un orchestre, le «truc» est que chacun joue sa partition afin qu’il n’y ait pas de fausses notes. Cela s’appelle avoir du talent. Et Abdellatif Ouahbi en a à revendre. Ceux qui ont raté sa sortie, le 10 mai courant, sur la chaîne «Al Oula», en seront pour leurs frais. Le leader du PAM et puissant Ministre de la Justice n’a pas mâché ses mots sur le plateau de l’émission «Noqta Ila Satr» («Un point, à la ligne»). Voici un florilège pour s’en convaincre : «Nos ministres traitent les dossiers en adoptant une approche technique et en omettant l’aspect politique et médiatique», «Le gouvernement travaille, mais la couverture médiatique de plusieurs décisions prises laisse à désirer. Je pense qu’il y a un manquement à ce niveau, qui doit être surmonté», «Mon rôle, en tant que parti politique, ne consiste pas à affaiblir l’opposition, mais au contraire à faire en sorte de la renforcer», «La lutte contre la corruption est du ressort des institutions et non de la société civile».

La morale de l’histoire : le talent, c’est aussi de donner à croire qu’on rame à contre-courant tout en souquant ferme droit devant !

Related Articles

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Back to top button