Un «tablier-manifeste» pour revaloriser le travail des femmes à la maison

À la veille de la fête du Travail, l’Association Tahadi pour l’Égalité et la Citoyenneté (ATEC) a lancé une initiative inédite pour dénoncer l’«invisibilisation» du travail domestique accompli chaque jour par des millions de femmes au Maroc. Avec le soutien d’ONU Femmes Maroc, ATEC a ainsi dévoilé une campagne nationale percutante qui repose sur un symbole fort : un «tablier-manifeste» où une fiche de poste fictive est sérigraphiée, listant les tâches assumées au quotidien par les femmes dans les foyers.
Cuisinière, éducatrice, infirmière, intendante, planificatrice… Autant de rôles endossés sans reconnaissance ni rémunération. À travers cette «fiche de poste imaginaire», ATEC souhaite alerter l’opinion publique sur l’ampleur de cette charge invisible qui soutient, silencieusement, la stabilité des familles et de l’économie.
«Cette initiative s’inscrit dans notre engagement à faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes au Maroc. En rendant visible le travail invisible, nous contribuons à déconstruire les stéréotypes et à poser les bases d’un nouveau contrat social au sein des foyers», souligne Bouchra Abdou, directrice de l’Association.
Aujourd’hui, 1er mai, la mobilisation prend la forme d’une marche dans le quartier Derb Omar à Casablanca. Des femmes, mais aussi des hommes, y défileront, tous vêtus de ce tablier symbolique, en partenariat avec la Confédération Démocratique du Travail (CDT). L’objectif : rendre tangible une injustice encore absente des grands débats nationaux et exiger une reconnaissance concrète du travail domestique non rémunéré.
Selon le Haut Commissariat au Plan (HCP), les femmes au Maroc consacrent en moyenne 5 heures par jour aux tâches domestiques, contre à peine 43 minutes pour les hommes. Un déséquilibre massif qui freine l’émancipation économique des femmes et perpétue des inégalités de genre structurelles.
Baptisée «Ch9a Dare Machi 7ogra» («Ce que je fais à la maison n’est pas une faveur»), la campagne s’étendra jusqu’en septembre 2026. Elle ambitionne de réduire d’au moins une heure par jour la charge domestique supportée par les femmes dans les foyers ciblés. Une série d’actions sera déployée à l’échelle nationale : théâtre itinérant, affichage urbain, événements sportifs, campagnes digitales et créations audiovisuelles portées par les jeunes.
Une application mobile innovante viendra également mesurer la charge réelle de travail domestique dans les familles, contribuant à une prise de conscience concrète sur la répartition inégale des tâches.
Ce projet s’inscrit dans le programme régional «Dare to Care» d’ONU Femmes, soutenu par l’Agence suédoise de Coopération internationale au Développement. Il vise à transformer les normes sociales patriarcales et à impliquer les hommes et les garçons dans la redistribution équitable des responsabilités domestiques et de soins.
Au-delà de la campagne de sensibilisation, ATEC appelle à un changement structurel : reconnaître, valoriser et partager équitablement le travail domestique. À l’occasion de la Fête du Travail, l’Association rappelle que tout travail mérite reconnaissance et justice ! Car sans équité à la maison, l’égalité dans la société reste une illusion…
L. F.