Alain Delon, «monstre sacré» ? Vraiment ?
Par HASSAN EL ARCH
Le monde cinématographique a perdu une de ses figures les plus emblématiques et Israël a perdu un de ses soutiens et donateurs les plus généreux. Voilà tout ce que je retiens de la disparition d’Alain Delon, avant-hier, 18 août. «Monstre sacré» pour les uns, mariole ultra-méga-hyper-narcissique pour les autres… Celui qui parlait parfois à la troisième personne du singulier, face aux caméras, s’est éteint à 88 ans après une carrière pleine de films plus ou moins bons, une centaine au total, et surtout une théâtralisation de tous les instants autour d’un ego prodigieusement hypertrophié.
On le disait très beau. Oui, assurément il l’était. Est-ce ce «canon» qui fait la valeur d’un acteur ou son talent ? Il faut chercher la réponse dans les filmographies de Jean Gabin, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Yves Montand, Roger Hanin, et bien d’autres. La mémoire est toujours curieusement sélective !
On glosera tant qu’on voudra, Alain Delon n’avait pas le charisme et la présence de quelques unes de ces vraies sommités du 7ème Art français. Il avait en revanche, c’est absolument vrai, une belle gueule. Et une conscience permanente de la nécessité de s’en servir comme atout primordial tout au long de sa carrière. De ce point de vue, il a d’ailleurs plutôt bien vieilli. Comme ces crus français qui se bonifient avec l’âge. Sauf que sur la fin, il a payé son tribut à la santé qui déclinait à vue d’œil. Ses trois héritiers n’ont pas hésité à s’écharper autour de la succession ! Car tout acteur qu’il était, Alain Delon était aussi et surtout un businessman avisé. Il a capitalisé sa marque de fabrique en Europe, en Asie et aux States. Régulièrement, il faisait des dons conséquents aux mouvements anti-palestiniens en Israël pour rappeler sa judéité engagée. Politiquement, on retiendra qu’il a longtemps flirté avec les mouvances xénophobes de l’extrême-droite en France. Une sympathie bien assumée pour le fondateur du Front National, Jean-Marie le Pen. Il disait de lui notamment : «On peut lui reconnaître au moins trois choses. Il est sympa. Il dit tout haut des choses que les autres osent à peine dire tout bas. Il parle différemment». Et d’enfoncer le clou, en 2013, en déclarant approuver «Que le Front National prenne une place très importante» dans la vie politique française.
Sur les femmes, qui pourtant se jetaient à ses pieds, des décennies durant, il était d’un flegme immuable : «Les femmes se sont battues pour avoir des droits, elles ont eu ce qu’elles voulaient. Très bien. Mais pourquoi aller jusqu’à se comporter comme des hommes ? Pourquoi vouloir leur ressembler ? Je ne comprends pas. J’ai dit que j’avais giflé une femme ? Oui. Et j’aurais dû ajouter que j’ai plus reçu de baffes que je n’en ai données. Elles m’ont beaucoup harcelé, et aujourd’hui encore, alors que je n’ai plus grand-chose à donner».