Effort militaire, souci de paix

PAR HASSAN EL ARCH
Pour ceux qui n’ont pas le tournis devant l’ampleur des chiffres, l’actualité fournit en ce moment de quoi s’en mettre plein la tête. Actualité stratégique, en l’occurrence, les chiffres en question ayant trait à l’effort militaire en cours de déploiement par le Royaume. La défense nationale est, comme chacun le sait, extrêmement budgétivore sous tous les gouvernements de la planète. A commencer, bien évidemment, par les pays les plus avancés.
Le Maroc est une puissance régionale. Il investit, en tant que tel, des fonds croissants chaque année pour renforcer ses capacités défensives et améliorer la sécurité de ses frontières terrestres, maritimes et aériennes. Sa souveraineté, en somme. Par effort militaire, il ne s’agit toutefois pas d’entendre «armement» au sens strict du terme. C’est tout un écosystème industriel, logistique, humain et financier qui forme, in fine, l’infrastructure militaire du pays et son organisation. Et même sans être exponentiel, cet effort n’en reste pas moins colossal dans tous les textes de Lois de Finances. Pour s’en convaincre, il suffit de (re)voir le fameux «Article 40» du Budget général de l’Etat et les indicateurs qu’il révèle : 35,15 milliards de DH budgétisés au titre de l’actuel exercice (2019) et 45,43 milliards de DH pour le prochain (2020). Une progression de 29,25%. Personnel, matériel et investissements confondus, c’est ce que l’Armée marocaine dépense pour son fonctionnement. La tendance étant naturellement à la hausse au fil des années pour toutes les raisons qu’on peut aisément imaginer : renchérissement des coûts de maintenance, acquisitions de nouvelles technologies, matériels et dispositifs sans cesse plus onéreux, formation et équipement des troupes…
La sécurité et la souveraineté nationales ont-elles un prix ? Assurément pas. Le Royaume a donc décidé de passer à la vitesse supérieure en actant une hausse importante de ses dépenses militaires et en changeant de modus operandi dans ses relations avec ses partenaires. Transfert de technologie, cela s’appelle (voir notre article en page 8). Abdellatif Loudiyi, Ministre délégué chargé de l’Administration de la Défense nationale, a déclaré récemment que «d’ores et déjà, le Royaume veut exiger de tout fournisseur d’armement un engagement de transfert de technologies de fabrication de matériel militaire et d’équipements aux Forces Armées Royales». Selon diverses sources, Maroc a aussi signé des accords pour l’achat de brevets relatifs à des armes de défense auprès de groupes industrialo-militaires européens, russes, chinois et indiens. Et des fournisseurs notoires tels que l’Espagne, le Royaume-Uni et le Brésil auraient manifesté leur volonté de prêter assistance et conseil pour le déploiement d’une base de défense dans le Royaume. Finalité : contenir au mieux la flambée de la facture à l’import tout en intégrant localement des technologies sensibles.
Le Maroc, comme chacun le sait ici et ailleurs, est un pays pacifique et pacifiste. Sans faire sienne la vieille devise latine «Si vis pacem, para bellum» («Si tu veux la paix, prépare la guerre»), il consolide sa défense et reste vigilant. Tout simplement.