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REPORTAGE

Marrakech accueille le gotha mondial de la santé

Sous le haut patronage de S.M. le Roi Mohammed VI, Marrakech abrite du 26 au 29 septembre courant les travaux de la deuxième conférence africaine sur la réduction des risques dans sa première édition Sud-Sud, avec la présence de 83 pays d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Asie, d’Amérique Latine et d’Océanie, sans oublier plusieurs pays européens ainsi que les États-Unis, le Japon et le Canada. Les conclaves se pencheront sur quatre thèmes de grande actualité : d’abord la gestion des catastrophes naturelles, suite au séisme dévastateur qui a frappé la région d’El Haouz; ensuite, la gestion des ressources hydriques, la protection de l’environnement et la mise en place de programmes efficients et durables pour une souveraineté alimentaire en Afrique. Ce grand événement réunit plusieurs Ministres marocains, africains, asiatiques, latino-américains, des experts du monde entier, des ambassadeurs, des scientifiques et des chercheurs. L’événement est organisé par le ministère de la Santé et de la Protection sociale, avec le ministère de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts et par African Global Health, l’association marocaine présidée par Dr Imane Kendili.

Ces conclaves sont lancés par le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, en présence de plusieurs membres de l’Exécutif, avec un message adressé aux participants de cette conférence par le Directeur Général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, pour souligner le travail effectué par les équipes marocaines et leurs partenaires dans le monde pour mettre sur pied la grande charte panafricaine de la réduction des risques dans une vision commune de la santé et de la protection sociales.

Sans nul doute, le plus grand défi pour l’Afrique ainsi que pour toute l’humanité, est de trouver des solutions efficaces et durables pour nourrir non seulement les huit milliards d’humains d’aujourd’hui, mais les 10 milliards à l’horizon 2050. La situation est telle aujourd’hui que le retard pris dans la gestion de la crise alimentaire nous met face à une urgence continentale de premier ordre, car des dizaines de millions d’Africains souffrent de famine quand d’autres millions luttent quotidiennement pour leur survie, dans un continent qui a tous les moyens d’assurer sa souveraineté alimentaire en mettant en place des programmes agricoles appropriés et des politiques africaines communes de coopération et d’échanges d’expertises pour assurer aux populations africaines leur nourriture quotidienne, dans la durée, avec une politique tournée vers les défis du futur dans une approche globale des problèmes liés à la sécurité alimentaire et à la gestion des ressources hydriques dont regorge l’Afrique, avec des centaines de rivières, des lacs, des façades maritimes à exploiter pour l’eau douce et les stocks destinés à l’irrigation. Toute une richesse naturelle avec des terres arables, des plateaux fertiles, des forêts et une main-d’œuvre considérable et prête à mettre les bouchées doubles pour relever ce pari agricole pour nourrir plus d’1 milliard 460 millions d’Africains. Ce sont exactement les trois axes principaux de cette deuxième conférence africaine sur la réduction des risques dans sa première édition Sud-Sud qu’abrite la ville de Marrakech du 26 au 29 septembre courant.

Prévisions et gestions des catastrophes naturelles

Pour cette deuxième Conférence, les questions cruciales d’actualité liées à la gestion des ressources hydriques dans le continent, à la préservation de la nature et la protection de l’environnement ainsi que les grands défis relevant de la sécurité alimentaire en Afrique, et partant dans tous les pays du Sud du globe, dont des centaines de millions de citoyens souffrent de malnutrition et de famine, toutes ces thématiques nécessitent une réflexion profonde et des analyses pointues de la part de tous les intervenants, chercheurs, scientifiques, spécialistes, ambassadeurs et ministres de tous les pays qui prennent part aux travaux de cette grande rencontre mondiale. Tous ces sujets brûlants aujourd’hui, dans un monde qui fait face à ses pires difficultés liées au réchauffement climatique, au stress hydrique et aux dégâts engendrés par la famine dans le monde, font l’objet d’études poussées, de débats approfondis et de concertations continues entre toutes les commissions scientifiques dans plusieurs pays, avec des partenaires solides et fiables pour African Global Health dans sa mission de fédérer tous les pays africains, asiatiques, américains et européens autour d’une politique commune de réduction des risques qui nous menacent, et ce, à plusieurs niveaux, sanitaires, écologiques, économiques et humains.

C’est dans cet esprit que cette deuxième conférence comprend un volet consacré à la prévision des catastrophes naturelles et à la gestion des risques tels que les tremblements de terre, les feux de forêt ou les inondations, avec des approches rationnelles et des analyses à la fois efficientes et puisées à même les réalités climatiques, géologiques et géographiques de chaque pays et de chaque région. C’est une occasion concrète de tirer toutes les leçons de l’impact du séisme qui vient de secouer notre royaume en apportant et en partageant notre expérience et notre expertise avec tous les partenaires dans le monde.

Cette thématique, qui revêt un aspect très particulier au vu de ce que notre pays vient de vivre suite au tremblement de terre, est traitée en profondeur par un panel de grands scientifiques et spécialistes tels que Sanaa Sayegh (Maroc), Wessam Mankola (Éthiopie), Colonel Zineddine Ammamou (Maroc), Ali Ardalan (Égypte), Edward Wollants (Salvador), Solomone Rataemane (Afrique du Sud), Patrick Mateta (Zimbabwe), Daouda Diouf (Sénégal), Hassan Ibouh (Maroc), Chiara Dimla (Philippines) et Ahmed Benlakhdim (Maroc), Avec des intervenants comme Ertugrul Taciroglu (USA), Diego Verrastro (Argentine), Avraham Rivkind (Israël), Recep Akdag (Turquie) avec Dr Sara Touirsi comme Secrétaire de cette session et Dr David Khayat (France) comme modérateur ainsi que Dr Daniela Munene (du Kenya).La séance inaugurale du mercredi 27 septembre mettra en lumière sur les grands défis qui attendent le monde dans la prévision et la gestion des catastrophes naturelles, notamment les séismes, mais aussi les inondations, les typhons, les cyclones, les tsunamis et les volcans.

Pour une souveraineté alimentaire mondiale

Dans le même esprit et avant de voir comment les Africains peuvent se prendre en main et réussir ce grand virage pour une sécurité alimentaire efficiente et durable, arrêtons-nous un instant sur le sens même de la souveraineté alimentaire. Le terme «sécurité alimentaire» est défini, par tous les spécialistes, comme l’accès physique, social et économique de tous et à tout moment à une nourriture à même de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. Cette sécurité est axée sur quatre points nodaux : la disponibilité alimentaire, l’accès à la nourriture, l’utilisation de la nourriture et la stabilité de la disponibilité alimentaire et de l’accès aux aliments. Par contre, l’insécurité alimentaire, quant à elle, est définie comme un manque d’accès à une nourriture suffisante à même de répondre aux besoins journaliers des populations. Dans ce sens, il faut savoir qu’aujourd’hui, partout en Afrique, l’agriculture est gravement frappée par les changements climatiques. Une précision de taille : dans la majorité des pays d’Afrique subsaharienne, le rendement des cultures peut diminuer de 10% à 20% d’ici à 2050 à cause du réchauffement climatique, du stress hydrique et de la mauvaise gestion des eaux et des ressources naturelles du continent. Pour être précis, prenons, à titre d’exemple le cas du blé, ce rendement moyen pourrait baisser d’ici à 2050 de 17%, celui du maïs de 5%, celui du sorgho de 15% et celui du millet de 10%. Pourtant, le secteur agricole emploie entre 65% et 70% de la main-d’œuvre africaine et représente entre 30% et 40% du PIB de chaque pays. Ces réalités ont feront l’objet de la grande conférence sur la sécurité alimentaire, présidée par le Ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, Mohamed Sadiki, avec pour Secrétaire de la session Dr Rania Mamdouh (Égypte) et pour modérateurs, Dr Hicham Skalli Lami (États-Unis) et Dr Enrique Terran (Équateur). Le débat sur la cruciale question de la sécurité alimentaire est confié à des experts mondiaux tels que Roumadi Ahmed (Indonésie), Idrissa Ba (Sénégal), Ataoulaye Bah, (Mali), Rady Hammad (Égypte), Jennifer Nailes (Philippines), Mahbub Maafi (Indonésie), Koleka Molisana (Afrique du Sud), Amit Kumar Singh (Zambie), Abdoulaye Bousso (Sénégal), Lungi Nyathi (Afrique du Sud) avec des intervenants tels que Nabil Abouchoaib (Maroc), Zuzana Schwidrovski (République Tchèque), Cofie Olufunke (Gahna), Bousmina Mustapha (Maroc), César Bernstein (Argentine, Fernando Spilki, (Brésil), Eyal Leshem (Israël), Randal Rodriguez (Costa-Rica), Yusuf Kamal Mirza (Pakistan), Azzi Abdelghani (Maroc) ainsi que d’autres chercheurs et spécialistes qui vont décortiquer l’épineuse et urgente problématique de la sécurité alimentaire dans un monde où des milliards d’êtres humaines souffrent de famine et de précarité à tous les niveaux.

Une autre conférence tout aussi cruciale sera celle consacrée à la sécheresse, au stress hydrique et à la gestion des ressources hydriques en Afrique, en Asie, en Amérique Latine, au Moyen-Orient et dans le monde aujourd’hui. Un monde qui doit mobiliser les moyens pour lutter contre les terribles et profonds effets des changements climatiques. Ce panel sur l’eau sera animé sous la présidence de Nizar Baraka, Ministre de l’Équipement et de l’Eau, avec pour Secrétaire de la session Marie Claire Makuza (Zambie) et comme modérateur Dr Delon Human (Afrique du Sud), avec la participation de figures telles que Marlène Amedome (Sierra Leone), Mainan Innocent (Tchad), Godfrey Pratt (États-Unis), Amadou Niass (Sénégal), Aishatu Aboubakar (Nigeria), Ronald Mhizha (Zimbabwe), Dilip Singh Rathore (Inde), Fatima-Zahra Lahlou (Maroc), Aloyce Urassa (Tanzanie), Ahmad Gharib (Égypte), Millicent Hlatswayo (Afrique du Sud), ainsi que Abdenebbi El Mandour, du Musée Mohammed VI de l’Eau, Tarik Hassan, représentant de l’UNESCO, Ricardo Izurieta (Équateur), Jean-Claude Bakema (République Démocratique du Congo), Pedro legua (Pérou), Katherine Vammen (Nicaragua), Rogelio Varela (Philippines), Alexei Peter Dos Santos (Brésil), Tchari Koli Maloum (Tchad) et d’autres scientifiques et chercheurs qui ont montré à quel point le réchauffement climatique a changé le visage du monde et a profondément bouleversé les géographies mondiales, avec la raréfaction des fleuves, des rivières, des lacs et des points d’eau. Tout cela occasionne des sécheresses durables et de plus en plus meurtrières ainsi que des problèmes liés aux réfugiés de l’eau qui migrent vers des régions moins dures et plus clémentes.

L’Afrique : un potentiel énorme

Cette réalité et tous les risques qui menacent le continent sont en grand décalage avec le potentiel de l’Afrique pour assurer sa sécurité alimentaire. D’après les données de la Commission économiques des Nations unies pour l’Afrique, le continent est riche. Il est même très riche et peut assurer son indépendance économique dans tous les secteurs. L’Afrique peut même exporter et devenir la plaque tournante des capitaux pour les trente prochaines années. Un tour d’horizon des richesses de l’Afrique nous donne une vision claire des dysfonctionnements qui impactent négativement tous types de développement dans le continent. L’Afrique possède 54% des réserves mondiales de platine, 78% de diamant, 40% de chrome, 28% de manganèse.19 pays d’Afrique possèdent d’importantes réserves d’hydrocarbures, de pétrole, de gaz, de charbon et différents minéraux. Sans oublier 90% des réserves mondiales de Cobalt, le minerai le plus important aujourd’hui pour toutes les industries du futur. Sans oublier l’or, avec le Ghana, qui a dépassé l’Afrique du Sud en tant que premier producteur d’or du continent. En 2019, le pays a produit plus de 142,4 tonnes d’or. L’Afrique du Sud reste un acteur majeur, avec une production de 118,2 tonnes d’or en 2019. Le Soudan, le troisième plus grand pays d’Afrique par sa superficie, a produit plus de 76,6 tonnes d’or en 2019. Le Mali, pays d’Afrique de l’Ouest, a connu une augmentation significative de sa production d’or, passant de 61,2 tonnes en 2018 à plus de 71 tonnes en 2019. Et le Burkina Faso, avec une production de 62 tonnes d’or en 2019, complète la liste des cinq principaux producteurs d’or en Afrique. Nous pouvons au vu de ces chiffres faire le lien entre les conflits dans ces pays et les différents coups d’État qui y sont survenus, sur fond de grandes richesses en ressources naturelles, convoitées par les grandes puissances, qui freinent le développement du continent et continuent d’exploiter ses richesses en l’appauvrissant davantage. D’ailleurs l’or était le premier produit exporté en valeur de 16 pays en 2020, soit environ 30% des nations africaines. Hormis l’or, le sous-sol du continent regorge aussi de divers métaux de première importance, comme le fer, le cuivre, l’aluminium… À l’échelle mondiale, on estime que l’Afrique représente 40% des réserves d’or, 30% des réserves de minerais et 12% des réserves de pétrole. L’Afrique possède à elle seule plus de 60 types de minerais différents, totalisant ainsi un tiers des réserves minérales mondiales, tous minerais confondus. A titre d’exemple, elle est dotée de 90% des réserves de platinoïdes, 80% de coltan; 60% de cobalt et 70% de tantale.

Tout ceci s’ajoute à la guerre d’influence qui se joue en Afrique autour des terres rares. Cette guerre est ouverte entre la Chine, la Russie et les États-Unis. Et c’est dans ce sens que la Maison-Blanche multiplie les mains tendues aux pays africains afin de développer des relations bilatérales autour de l’extraction et du raffinage des minerais stratégiques.

Ressources énergétiques colossales

Le continent africain regorge de sources énergétiques très variées, réparties dans des zones distinctes : abondance d’énergies fossiles (gaz en Afrique du nord, pétrole dans le Golfe de Guinée et charbon en Afrique australe), bassins hydrauliques en Afrique centrale, gisement uranium ; rayonnement solaire dans les pays sahéliens ; et capacités géothermiques en Afrique de l’est. À un autre niveau, le continent compte 24 % des terres arables mondiales, alors qu’elle ne génère que 9% de la production agricole. La population africaine équivaut à environ 17% de la population mondiale, mais ne consomme que 4 pour cent de l’énergie produite. Pourtant, le nouveau rapport de la Banque Mondiale révèle que les pays africains n’engrangent en moyenne que 40% environ des recettes qu’ils pourraient potentiellement tirer de leurs ressources naturelles. Si ces richesses sont un argument en faveur du développement du continent, elles ne profitent encore pas assez aux populations et de nombreuses économies africaines peinent à les convertir en développement économique stable. Deux principales raisons expliquent cette situation décrite comme une «malédiction des matières premières en Afrique» par les économistes. D’abord, la volatilité des prix des matières premières, qui a un impact majeur sur le PIB des pays exportateurs. Puis le fait que ces ressources et la manne financière qu’elles génèrent entraînent d’importants problèmes de gouvernance et de corruption, impliquant à la fois les gouvernements locaux, mais aussi des multinationales ou des puissances étrangères. Dans ce sens, l’enjeu pour la plupart des pays d’Afrique est donc de pouvoir transformer ces matières premières en source de croissance et, dans un second temps, de se diversifier économiquement pour moins dépendre de ces mêmes ressources.

Ce sont là les différentes axes qui seront traités par plus de 300 experts internationaux qui se sont donnés rendez-vous à Marrakech, pour mettre sur pied des programmes communs de lutte contre les dérèglements climatiques, contre le stresse hydrique, contre l’insécurité alimentaire, avec des programmes efficients pour une gestion optimale des catastrophes comme l’a démontré le Maroc, qui a pris à bras le corps les conséquences du séisme dévastateur qui frappé la région d’El Haouz montrant ainsi l’exemple et se positionnant comme un pays d’expertise fiable qui peut fédérer autour de sa vision et de ses stratégies tous les partenaires mondiaux, ainsi qu’on le voit lors de cette deuxième Conférence. Un événement qui, il faut le dire, n’est plus seulement africain, mais désormais mondial, puisqu’il réunit plus de 80 pays de tous les continents dans ce qui restera dans les annales comme la première conférence Sud-Sud sur la réduction des risques dans le monde. D’ailleurs, le rendez-vous est d’ores et déjà pris pour 2024, dans un grand conclave autour de questions aussi urgentes que la santé, cheval de batailles de toutes les grandes nations, mais également l’éducation et le partage des expertises mondiales dans des domaines comme le climat, l’écologie et la protection des populations.

ABDELHAK NAJIB

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