La politique a ses raisons que le tourisme ignore

Par HASSAN EL ARCH
Directeur de la Rédaction
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Jusqu’à preuve du contraire, cinq heures incompressibles de décalage horaire existent entre les deux façades de l’Atlantique. Pratiquement, l’équivalent d’une demi-journée. Dans le sens Casablanca-New York, on est familier du phénomène, votre repas de 13h se passant, en temps réel, à 8h pour les Américains qui bâillent encore sur leur petit-déjeuner. L’inverse serait un peu moins drôle, à en croire le personnel navigant des compagnies aériennes quand ils volent d’ouest en est, mais cela est une autre histoire… Celle qui nous concerne, en l’occurrence, tient en une question incongrue : Adel El Fakir aurait-il le don de l’ubiquité ? Non, bien sûr que non. À notre connaissance, même les super-héros de l’univers Marvel n’ont pas ce pouvoir. La question n’en titille pas moins les esprits depuis jeudi, lorsque les médias nationaux ont reçu deux communiqués annonçant, l’un, que le Directeur Général de l’ONMT prenait part au Conseil du gouvernement, présidé le jour même à Rabat par Aziz Akhannouch, et l’autre, que l’opération de promotion «Light Tour», pilotée par Adel El Fakir, bouclait en apothéose, également jeudi, sa tournée dans la Big Apple !
Un rapide calcul démontrait évidemment l’impossibilité pour quiconque d’être simultanément à New York et à Rabat. Même l’infatigable patron de l’ONMT ne peut se démultiplier à ce point. Vérification faite, on a appris qu’il a été appelé à prendre part hier à un Conseil du gouvernement qui le concernait au premier chef. Et pour cause : l’ordre du jour était consacré à l’examen de la relance (bien amorcée) de la saison touristique. Vérification faite aussi, on a appris qu’en l’absence d’Adel El Fakir, rentré illico à Rabat, la délégation marocaine était très bien coachée par le plus «lourd» de ses membres en la personne de Hamid Bentahar, Président de la Confédération Nationale du Tourisme (CNT), aux côtés de toute une dream team, d’ailleurs. Lahcen Zelmat, Président de la Fédération Nationale de l’Industrie Hôtelière (FNIH), Mohamed Semlali, Président de la Fédération Nationale des Agences de Voyage (FNAV), Rkia Alaoui, Présidente du Conseil Régional du Tourisme (CRT) de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Aziz Lebbar, Président du CRT de Fès-Meknès, Hassan Bargach, Président du CRT de Rabat-Salé-Kénitra, Othmane Chérif Alami, Président du CRT de Casablanca…
On peut s’interroger sur la concomitance de deux événements aussi essentiels pour l’écosystème tout entier du tourisme. Autant la participation en mode présentiel (comme on dit dans le jargon covidien) du patron de l’ONMT à la phase finale de la «Light Tour» aurait été logique, voire emblématique de tout le travail abattu en si peu de temps par ce haut responsable, autant sa présence physique était tout aussi nécessaire dans un conclave où l’Exécutif devait statuer sur les ressorts de la reprise du secteur. La Ministre de tutelle était présente, d’ailleurs, à ce Conseil du gouvernement. Curieusement, pas à l’opération «Light Tour» qui avait pour finalité, justement, d’expliquer aux prescripteurs des marchés émetteurs français, britannique et américain pourquoi il faut miser sur le Maroc et croire en ses promesses. Mais ne nous y trompons pas : la politique a, parfois, ses raisons que le tourisme ignore…