Grandiose tombée de rideau ce soir sur le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde

Le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde enregistre un très beau succès pour sa 26ème édition, tenue du 9 jusqu’au 12 juin courant, après deux années de pause en raison de la crise sanitaire. La soirée d’ouverture, présidée par S.A.R. la Princesse Lalla Hasnaa, a été une très belle fête avec un magnifique spectacle de musique et de lumières où le monument Bab Makina a été, le temps d’une soirée, un centre spirituel qui rayonne vers le monde.
«L’architecture et le sacré» est le thème de cette édition de la reprise, qui a vu la journée du vendredi se décliner en plusieurs événements festifs, faits de rencontres culturelles et musicales mais aussi et surtout de découvertes de lieux rares et inspirants. La synagogue Aben Danan, joyau de la culture judéo-marocaine, érigée au XIIème siècle, a été l’un des points de convergence. Considérée comme l’un des plus importants lieux de culte juif en Afrique du Nord, elle est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO et a été entièrement rénovée et ouverte à la visite en tant que synagogue-musée. On y a apprécié un merveilleux récital donné par le pianiste Michaël Levinas et la soprano Marion Grange. Les festivaliers ont pu également visiter Jnane Sbil, le poumon vert de Fès, composé de neuf jardins luxuriants sur sept hectares créés au XVIIIème siècle par le sultan Moulay Abdallah. Les visiteurs ont écouté de la musique mystique de l’Ensemble Al Zawya. Des chants spirituels, venus du Sultanat d’Oman, ont offert une expérience du «Samaâ» dont la finalité est d’élever l’humain dans la gratitude, l’amour et la paix. La même journée, au cœur de la médina, dans l’ancienne Résidence du Gouverneur, Dar Adiyel, aujourd’hui restaurée et abritant le Conservatoire de Musique Andalouse Traditionnelle, la soirée a été animée par le Chœur de Chambre du Maroc, conduit par le talentueux Amine Hadef, qui a interprété des œuvres issues notamment du répertoire baroque. Ailleurs, sur l’esplanade de Bab Makina, les sublimes «Roohani Sisters», des sœurs indoues, ont donné un très beau spectacle.
La journée du samedi n’a pas été moins dense, notamment en termes de débats et d’échanges entre artistes, intellectuels et grand public. Driss Khrouz, Directeur Général de la Fondation Esprit de Fès, a animé des pans entiers de ces débats avec l’appui de Souad Belakziz, Andrea Anastasio, Susana Calvo Capilla, Mohamed Belatik, Hicham Rguig et Abdallah Fili, tandis que Danielle Cohen Levinas , Nasser Al-Taee, Michael Levinas, Abdessalam Amarir et Abdelouahed Bencer ont répondu aux questions sur les liens entre «Espaces et modes de vie en relation avec le sacré dans l’architecture» puis sur «Les symboles du sacré dans l’architecture».
Dar Adyel a accueilli une des plus lointaines expressions orientales de la Nouba arabo-andalouse. Pour sa part, Saniye Ismail a fait la part belle au répertoire ouïghour de l’«Onikki Muqam», qui est influencé par la civilisation islamique, mêlant des éléments des antiques civilisations indo-iraniennes et bouddhiste. Dans la soirée, le célèbre trompettiste d’origine libanaise Ibrahim Maalouf a enflammé la scène de Ba Makina. En compagnie de ses compères qu’il fréquente depuis dix ans, l’«Haïdouti Orkestar», des artistes venus d’Europe de l’Est, d’Afrique du Nord, d’Europe du Nord, d’Andalousie, du Moyen-Orient, il a illustré merveilleusement bien cette «World Music» pleine de tempo et de spiritualité. Ibrahim Maalouf a été longuement ovationné par un public totalement conquis, qui l’a réclamé une nouvelle fois alors que l’artiste avait quitté la scène. Eh bien, il est revenu en l’honneur de cette belle stand ovation ! Il s’est aussi excusé d’avoir… malmené sa trompette !
La dernière journée du festival, ce dimanche 12 juin, est marquée entre autres par des moments de réflexion et de méditation à la synagogue-musée Aben Danan pour le cycle «Espenbaum» de Michaël Levinas avec la soprano Marion Grange. Dans l’univers luxuriant de Jnan Sbil, un vent d’histoire fait souffler des millénaires de civilisation ! Un voyage «De Fès à Jérusalem» est programmé pour convaincre les festivaliers que «Chaque chant entre en résonance avec toutes les infimes parties de l’édifice que nous habitons, mais aussi avec nos propres sentiments, fruits de nos éducations diverses». Pour sa part, Dar Adiyel prête son écrin aux mélodies des confréries de Sardaigne, mystérieuses mais angéliques, qui plongent leurs racines dans la Méditerranée. La soirée sera dédiée, dans le cadre grandiose de Bab Makina, à la clôture du festival. Une 26ème édition de la reprise, de l’espoir, de la constance et de la paix !
LAIDIA FAHIM