Tragédie du défunt Rayan : quand les médias électroniques salissent la profession !

Le Conseil National de la Presse (CNP) a appelé, vendredi dernier, au respect de la déontologie journalistique lors de la couverture médiatique des opérations de sauvetage de l’enfant Rayan, décédé suite à sa chute, le 1er février, dans un puits dans la commune Tamorot (province de Chefchaouen). Dans un communiqué, le CNP a dit «suivre avec profond regret certaines pratiques ignobles qui ont émaillé la couverture médiatique des opérations de sauvetage de l’enfant», faisant état de «nombreuses violations à la charte de déontologie du journalisme, commises par des journaux électroniques qui ont fait litière des principes humanitaires contenus dans ladite Charte».
Le CNP a insisté en rappelant que les entreprises de presse, journalistes et professionnels de l’information «sont tenus de respecter ces principes, particulièrement en temps de crises et de catastrophes qui ne doivent, en aucun cas, s’ériger en source de gain matériel et de sensationnalisme mesquin pour augmenter le nombre de visionnages, entre autres méthodes visant à monnayer les drames humanitaires».
Le CNP a passé en revue certaines de ces violations, comme le fait d’avoir diffusé des images du défunt enfant au fond du puits, le visage maculé de sang, dans une situation humaine très difficile qui portait atteinte aux sentiments de sa famille. Une violation flagrante du principe de respect de l’image et de la vie des gens. Plusieurs médias électroniques ont par ailleurs filmé et interviewé des enfants et des mineurs présentés comme «traumatisés» suite à l’accident mortel qui a coûté la vie du petit Rayan. Sans parler de la publication de photos de mineurs à travers des vidéos filmées dans le périmètre de la zone de sauvetage, à des fins de sensationnalisme gratuit, au mépris de la situation psychologique et de l’âge des enfants ! Et sans parler d’actes abominables consistant à travestir la réalité en publiant une photo d’un jeune garçon latino-américain accidenté en début d’année et présenté comme étant le défunt petit Rayan. Le tout sur fond de course aux clics et aux likes, dans le mépris total des valeurs humaines et de la décence.
Ces pratiques se situent totalement en porte-à-faux du premier axe de la Charte du Conseil National de la Presse, notamment l’Article 1 relatif à la quête de la vérité, rappelle le Conseil, soulignant que le traitement des données relatives à l’opération de sauvetage s’est fait de manière non professionnelle avec la diffusion d’informations fallacieuses, une prépondérance flagrante de la logique mercantile en plus de la non authentification des faits rapportés.
Rappelons que certains «journaux» électroniques ont interviewé des membres de la famille du défunt Rayan dans l’unique but que les images vidéo allaient augmenter le nombre de vues. Une autre violation flagrante des dispositions de la Charte de déontologie du journalisme, notamment la première clause relative au respect de la dignité humaine. Le CNP souligne avec force que la couverture médiatique des drames humains implique fondamentalement «le respect par la presse de ses responsabilités sociales et son souci de ne pas appréhender les tragédies comme moyen lucratif».
A l’opposé, le Conseil a salué le travail des supports médiatiques ayant accompli un travail journalistique sérieux et professionnel, faisant savoir «qu’il est en train de lister les différentes infractions nécessitant une poursuite disciplinaire en vue de l’activation de la Charte de déontologie du journalisme, et ce, conformément aux dispositions de la loi portant création du CNP, son règlement intérieur et la procédure de réponse automatique aux violations de l’éthique de la presse».
M. E.