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POLITIQUE

Naïma M’Fadel : ses coups de sang, ses convictions et ses rêves

On la surnomme souvent la Dame de Fer. Marocaine de naissance et Française d’adoption, Naïma M’Fadel se bat pour renforcer les liens entre la France et le Maroc, et entre la France et l’Afrique francophone de manière plus générale. Elle est candidate de l’Union de la Droite et du Centre, soutenue par les mouvements UDI, LR et Centristes pour la 9ème Circonscription des Français de l’étranger. Dans son viseur : les élections législatives qui auront lieu les 5 et 19 juin courant. Cette battante qui revendique une «identité heureuse», a animé un grand meeting, lundi dernier, au Grand Mogador City Center à Casablanca. Nous l’avons interrogée sur ses convictions et son… énergie !

Propos recueillis par HASSAN EL ARCH

Qu’escomptez-vous exactement des élections législatives qui se dérouleront les 5 et 19 juin prochain ?

Les Français vivant à l’étranger sont les ambassadeurs de notre pays. Ils incarnent l’esprit français. Ils représentent tout ce que la France véhicule dans le monde, ses valeurs, sa culture et son histoire. En cela, ils sont de véritables passeurs qui font vivre notre pays au-delà de ses frontières. Ils sont une richesse sur laquelle notre nation doit s’appuyer pour que la France renforce et enrichisse cette relation affective, fraternelle et si singulière que nous avons avec l’Afrique francophone. Une fois qu’on a dit cela, il faut aussi prendre conscience des difficultés qu’ils rencontrent au quotidien et qui ne sont toujours pas réglées, voire qui s’aggravent depuis dix ans durant lesquels nos gouvernants sont allés de renoncements en abandons, sans le moindre scrupule et en piétinant, au passage, ce principe cardinal d’égalité entre les citoyens ! Aussi, je souhaite, pour cette 9ème Circonscription, un élu au fait des difficultés que rencontrent les Français de l’étranger. Un élu qui aura le courage de s’engager pour, enfin, apporter les solutions qu’ils sont en droit d’obtenir. Un élu proche de ses compatriotes, accessible et présent. Je suis prête à relever ce défi auquel je me suis préparée depuis longtemps. Mes relations avec cette Circonscription sont bâties de longue date sur des liens profonds, amicaux et familiaux, mais aussi associatifs tissés dans de nombreux pays d’Afrique. Une partie significative de ma famille est expatriée en Afrique depuis bientôt trois décennies. Deux de mes enfants sont installés au Maroc et j’y ai également des enfants scolarisés. C’est grâce à mes racines, à cette présence, à mes nombreux voyages, à mon installation au Maroc et aux liens permanents que j’entretiens avec cette Circonscription, que je suis pleinement consciente des enjeux et des difficultés économiques, culturelles et sociales inhérentes à l’expatriation. Je suis une femme engagée, depuis de longues années, au service de la France et de la République. D’abord, mon investissement s’est axé autour des questions sociales et culturelles, essentiellement en tant que coordinatrice de centres sociaux. Puis je suis devenue déléguée du préfet des Yvelines, que j’ai représenté auprès des Collectivités. Depuis 2018, je suis conseillère à la présidence de la région Ile-De-France où j’ai pu favoriser des actions autour de l’entrepreneuriat des femmes et des jeunes, en collaboration avec les Collectivités, l’État et des associations. J’ai acquis une expertise dans les politiques publiques. Ces diverses expériences ont forgé ma personnalité et me permettent, légitimement, de m’investir sur cette mandature !

Quels sont les ingrédients de l’engagement que vous défendez aujourd’hui au service de la France et de vos concitoyens ?

Partout, j’ai entendu l’indignation, le sentiment d’avoir été oubliés, ignorés et de n’être que des citoyens de seconde zone… L’éloignement géographique ne doit plus entraîner le mépris et le délaissement ! Il est temps que la France et la République regardent vers leurs enfants qui ne vivent pas en métropole, mais qui sont ses ambassadeurs, qui font vibrer la voix de la France, rayonner sa langue, sa culture et son art de vivre aux quatre coins de la planète. Les ingrédients de l’engagement que je défends aujourd’hui se répartissent sur les principales préoccupations de nos compatriotes : la scolarité, l’entrepreneuriat, la fiscalité, les consulats, la sécurité, la culture et surtout la santé. J’ai une pleine conscience des difficultés que rencontrent les Français de l’étranger au quotidien et qui ne sont toujours pas réglées. Un exemple éloquent qui illustre ces terribles reculs qui ont tant abîmé notre pays : entre 2012 et 2016, la baisse de plus de 8% des crédits dédiés à l’enseignement français. Les effectifs de notre diplomatie culturelle ont aussi été réduits de 20%. Je n’oublie pas également la suppression de 331 postes dans nos ambassades et nos consulats, au détriment des Français établis hors de France. Pourtant, nous savons combien ces ressources sont essentielles pour le rayonnement de notre pays dans le monde. Prenons encore la question de l’éducation et de la scolarité. J’ai grandi à l’ombre de ce principe constitutionnel fondamental qui fait de notre école républicaine une école gratuite pour tous. C’est grâce à cette école gratuite et laïque que j’ai pu m’élever, m’émanciper et réussir. Or, que reste-t-il de ce principe républicain quand notre pays n’accorde pas à tous l’égal accès à l’enseignement français ? Que reste-t-il de ce principe républicain quand vous devez payer des frais de scolarité exorbitants, dans un contexte de suppression de 512 postes et de 33 millions d’euros de baisse des crédits alloués à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ? J’ai soulevé cette question au niveau national depuis le début de ma campagne, par la publication d’une Tribune dans le média national français «Le Figaro», introduisant, de fait, ce sujet au cœur des débats nationaux. Que reste-t-il quand nos lycéens sont lésés dans leur orientation ? Que reste-t-il quand l’inclusion de nos enfants handicapés est encore difficile ? Que reste-t-il enfin de ce principe fondamental quand nos enseignants n’ont plus les moyens de travailler dans de bonnes conditions ? Il y a aussi les difficultés liées à la fiscalité, injuste et discriminante pour nos compatriotes. La France est célébrée partout dans le monde avec sa gastronomie, son patrimoine culturel ou encore son art de vivre. Mais notre pays est aussi le champion du monde, toutes catégories, concernant les impôts, les taxes et les prélèvements obligatoires. Souvenons-nous : en 2012, les socialistes avaient assujetti l’ensemble des Français de l’étranger à la CSG-CRDS (NDLR : contribution sociale généralisée et contribution au remboursement de la dette sociale). Ayant été condamnés par la Cour Européenne, ils ont décidé de maintenir cette contribution pour les extras européens. Aujourd’hui, un Français installé en Côte-d’Ivoire ou au Maroc ne paie pas les mêmes impôts que son compatriote qui réside à Barcelone. Quelle injustice ! La réforme fiscale du gouvernement Macron en 2019 aurait pu réparer cette injustice fiscale. Mais non ! Il a préféré maintenir cette fiscalité discriminante au détriment des Français vivant hors de l’Union Européenne. Je ferai de cette injustice fiscale une priorité de mon mandat. La question de l’accès à des services publics efficaces est aussi prégnante. Notre pays ne serait pas, non plus, ce qu’il est sans ces services publics performants qu’il a su bâtir au cours de notre histoire. Nous devons être fidèles à cette tradition d’excellence en nous montrant particulièrement exigeants pour l’administration qui sert nos compatriotes installés à l’étranger. Nous l’avons vu lors des précédentes crises : nos services consulaires ont montré leur agilité et leur efficacité. Mais j’entends souvent que la baisse des effectifs de ces réseaux a considérablement impacté le bien-être de ses agents comme la qualité du service public. Je m’insurge contre ces inégalités de traitement qui foulent aux pieds nos principes républicains. La vie à l’étranger ne doit plus être synonyme de complications administratives sans fin ! Je veux faire de nos consulats de véritables mairies facilitatrices dans toutes les démarches administratives. Je n’oublie pas, enfin, l’accès aux soins. Il n’est pas acceptable que la protection sociale offerte à un Français dépende de la région ou du pays dans lequel il vit… Là encore, j’ai entendu leurs préoccupations et leurs attentes en termes de protection sociale et de santé. Je sais, par exemple, combien la PUMA (protection universelle maladie) n’a d’universelle que le nom, notamment depuis la loi de 2019 qui a durci les conditions de prise en charge des soins dispensés en France aux Français de l’étranger. Et que dire des pesanteurs administratives sur les certificats de vie qui privent nos compatriotes de tout ou partie de leurs retraites ? Ces discriminations et cette rupture de l’égalité républicaine, je ne les accepte pas ! C’est pourquoi, dès mon élection, je me battrai pour que chacun d’entre eux puisse bénéficier, comme tous les Français, de la protection républicaine et de la solidarité française.

Vous revendiquez une « identité heureuse» héritée de vos parents marocains. Vous êtes Française d’adoption. Comment assumez-vous ce double héritage dans un contexte marqué par les tiraillements culturels, sociaux, historiques et politiques ?

L’identité heureuse et paisible dont je parle est due à une intégration réussie. Lorsque nous sommes arrivés en France en 1968, les quartiers dans lesquels nous habitions nous baignaient dans une vraie mixité sociale et culturelle. Mes parents avaient le souci de nous transmettre notre patrimoine culturel marocain tout en épousant le patrimoine culturel français. Ils nous ont élevés dans un Islam du juste milieu, ouvert et tolérant. Malheureusement, j’ai vu les liens se délier petit à petit entre les citoyens… Notre pays se fracturait et j’assistais, impuissante, à l’enclavement social et culturel et à la fin du vivre-ensemble. Aussi, je me suis engagée, pendant des années, en tant que déléguée du préfet des Yvelines, auprès des populations des quartiers dit défavorisés. L’ensemble de mon engagement a été reconnu au plus haut niveau en 2016, lorsque le Ministre de la Ville m’a remis la Médaille de Chevalier de l’Ordre National du Mérite. Témoigner et proposer des solutions a été mon moteur et ma motivation également lors de l’écriture de l’ouvrage «Et tout ceci devrait faire d’excellents français» en collaboration avec mon ami l’éminent chercheur Olivier Roy.

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