Réseaux sociaux ou asociaux ?

Par HASSAN EL ARCH
Directeur de la Rédaction
Les réseaux sociaux sont définitivement devenus une arme à double tranchant. Leur dangerosité n’est plus à démontrer. Leur impact est colossal sur la vie, l’intégrité mentale et la santé physique des gens. Et ne parlons même pas de leurs effets sur la morale et les valeurs de la famille. Tout se passe comme si la vie n’était plus désormais qu’une théâtralisation du quotidien. Une mise en scène, une glorification de la méchanceté, de la vulgarité, voire de l’obscénité. Regardez le show que donnent chaque jour les influenceurs, les youtubeurs, les facebookeurs, les tiktokeurs, les instagrameurs et les producteurs de «contenus» sur les réseaux sociaux. Les femmes étant beaucoup plus présentes que les hommes. Deux mots en résument l’effervescence : nivellement par le bas !
Pourquoi sont-ils une arme à double tranchant ? C’est évidemment une question rhétorique. Il y a, d’un côté, des adultes immoralement motivés, et de l’autre, des mineurs encore inconscients. Entre les deux, certaines valeurs qui fondent la société sont mises à mal : empathie, respect de l’autre, bonne éducation, innocence, ondes positives, pudeur, entraide… Nous en rappelons quelques exemples dans ce numéro dont la couverture est titrée (à juste titre !) : «Réseaux sociaux : la Justice sévit contre les voyous de la Toile». Deux sujets, dans cette édition digitale de notre magazine, rappellent la mesure du phénomène. La réaction musclée des autorités face aux cyber-dérives des adultes (page 26) et le constat de danger entre addictions et santé mentale s’agissant des enfants et des jeunes (pages 28 et 29).
En décembre dernier, le Ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a fait entendre devant les parlementaires que le temps des abus numériques est révolu et que le gouvernement se penche désormais de plus près sur la frontière entre liberté d’expression et droits fondamentaux des citoyens. Ces droits, on le voit chaque jour, sont piétinés, bafoués allègrement sur la Toile. La plateforme «E-Blagh», mise en place à cet effet par la Direction Générale de la Sûreté Nationale, a reçu pas moins de 7.083 signalements. Une moyenne de 78 par jour ! C’est dire le ras-le-bol, l’indignation de l’opinion publique face à la culture de l’insulte, du viol de la vie privée et du harcèlement moral dont beaucoup de producteurs de «contenus» ont fait un fonds de commerce extrêmement prospère.
Sur l’autre versant du phénomène, les enfants et les adolescents restent des victimes dangereusement vulnérables. Dans son nouveau livre «Réseaux sociaux : entre addictions et santé mentale», la psychiatre et addictologue Dr Imane Kendili explore les effets du numérique sur le bien-être psychologique en société. À travers une analyse précise et fort documentée, la spécialiste démontre comment ces outils, initialement conçus pour nous rapprocher, sont devenus des instruments d’isolement, d’addiction et de désinformation massive. «Sommes-nous encore capables de faire la part des choses entre la réalité et l’illusion numérique ?», s’interroge-t-elle.