L’état d’urgence a-t-il encore un sens ?

Par HASSAN EL ARCH
Directeur de la Rédaction
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La baisse des cas d’infection au coronavirus au Maroc est-elle un indicateur fiable de rupture ? Sommes-nous sortis de la pandémie ? Est-on enfin dans l’après-Covid ? Les médecins vous répondront «non» sans détours. Le Coordinateur du centre national des opérations d’urgence de santé publique au ministère de tutelle, Mouad Mrabet, enfonce régulièrement le clou en rappelant à qui veut bien l’entendre que la baisse du nombre de cas viraux ne signifie aucunement retour à une vie antérieure… Même si les chiffres attestent d’une chute significative des indicateurs épidémiologiques depuis plusieurs semaines.
Ne jamais céder à l’euphorie. Rester vigilant. Capitaliser les leçons douloureusement apprises depuis près de trois ans. Voilà ce que nous disent les experts de la santé, les sociologues et les décideurs politiques. Ils sont bien dans leur rôle. On se doit de les écouter, au regard des chiffres : 1.265.162 cas de contaminations et 16.278 décès enregistrés depuis la première infection signalée au Maroc, le 2 mars 2020 (chiffres officiels, arrêtés au 13 octobre courant). Même l’OMS, prompte à dénoncer le repli et à prôner l’ouverture, avertit la communauté internationale sur les périls d’un relâchement précoce des comportements.
Il n’empêche que l’économie tourne, Dieu merci, quasiment comme elle le faisait avant la crise sanitaire. Poussive encore dans certains secteurs, mais globalement orientée dans le bon sens. Elle tourne, colmate les brèches, produit de la richesse, crée de nouveaux emplois. Le mot résilience n’a pas d’autre sens. L’effet psychologique n’est pas négligeable, loin s’en faut. C’est même le catalyseur de la plupart des décisions, dans le public comme dans le privé. Sans espoir, point de vie !
Mais il n’empêche aussi que… l’état d’urgence est toujours là. Il encadre depuis 30 mois la vie de 36 millions de concitoyens et réglemente leurs libertés et leurs mouvements. Cadre formel disposé par la Constitution, il permet aux pouvoirs publics de prendre toutes les décisions jugées nécessaires pour gérer une situation exceptionnelle dans le pays. La pandémie en est une. C’est une réalité que personne n’aurait l’outrecuidance de discuter… Personne de sensé, s’entend. Mais la question se pose et s’impose dans les débats sur le sujet : à quel seuil bilanciel l’état d’urgence sera-t-il enfin abrogé ? En vigueur depuis avril 2021, il a permis de protéger les fondamentaux de la société. Comme il s’agit aujourd’hui de libérer les énergies de cette même société, qui donne des signes convaincants de renaissance, son maintien empêche le moral d’être ce qu’il doit être : un moteur dans une perspective de réelle renaissance. Les restrictions sanitaires ont été réduites à leur plus simple expression. C’est un fait aussi. Pour la cohérence de l’ensemble, l’Exécutif serait bien inspiré d’annoncer la bonne nouvelle aux Marocains, dès le début de l’année prochaine. À bon entendeur…