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MARIAGES PRÉCOCES

Le phénomène au Maroc concerne 27% des femmes rurales et 15% des citadines

«Le taux des mariages précoces au Maroc atteint 27,4% en milieu rural contre 15,2% en zones urbaines». C’est l’un des constats fait par l’Observatoire National du Développement Humain (ONDH) à travers sa nouvelle étude intitulée «Les discriminations inter-sectionnelles des femmes au Maroc». L’enquête pointe les dysfonctionnements des politiques publiques qui conduisent à la reproduction de ce phénomène, surtout dans les milieux sociaux les plus pauvres et les plus marginalisés.

À la question de savoir si le mariage précoce sévit toujours au Maroc, l’Observatoire National du Développement Humain (ONDH) répond par l’affirmative et donne des chiffres concrets à travers sa récente étude «Les discriminations inter-sectionnelles des femmes au Maroc». Basée sur les données issues d’une enquête sur les ménages, l’étude révèle que «pour la population âgée de 18 ans et plus, environ 19,5% des femmes ont conclu leur premier mariage avant l’âge de 18 ans contre seulement 1,5% pour les hommes, soit 13 fois plus». Cela dit, ce taux moyen cache d’importantes inégalités qui existent entre les différents groupes de femmes et de filles, si l’on tient compte de trois critères, à savoir le milieu de résidence, les niveaux de dépenses et la région de résidence.

Particularités régionales intéressantes…

En milieu urbain, «le taux de mariage précoce atteint 15,2% alors qu’il est de l’ordre de 27,4% en milieu rural, soit un dépassement de presque 80%», révèle le rapport de l’ONDH. S’agissant des niveaux de dépenses, l’Observatoire note que «le taux de mariage précoce se situe à 16% chez les femmes les plus riches alors qu’il atteint 25% chez les femmes les plus pauvres, soit un dépassement relatif de l’ordre de 56%». En ce qui concerne la troisième inégalité, la région de résidence en l’occurrence, elle à trait à la comparaison entre les taux des différentes régions les plus touchées par le fléau. Dans ce sens, les deux régions enregistrant les taux de mariages précoces les plus bas sont celles de l’Oriental avec 13,3% et Tanger-Tétouan-Al Hoceima avec 15,3%. À l’inverse, les deux régions marquées par les taux les plus élevés sont celles de Marrakech-Safi avec 27,7% et Béni Mellal-Khénifra avec 28,8%.

À l’analyse de ces critères, l’Observatoire fait remarquer que certains groupes de femmes sont moins impactés que d’autres en matière de mariages précoces. En effet, les femmes citadines les plus riches des régions de l’Oriental sont les moins impactées par le mariage précoce avec 10,9% de cas recensés. Elles sont suivies par les citadines de la région de Casablanca-Settat dont le taux se situe à 12,6%. En revanche, les groupes de femmes les plus défavorisés sont celles des zones rurales, notamment celles en situation de pauvreté. Marrakech-Safi et Béni Mellal-Khénifra sont les régions les plus impactées par ce phénomène avec respectivement 31,5% et 38,2%. «Les femmes rurales les plus pauvres représentent un taux de mariage précoce de l’ordre de 28,3% alors que les citadines les plus riches ont un taux de mariage précoce situé autour de 13,9%», indique l’étude de l’ONDH qui fait remarquer que «les dysfonctionnements des politiques publiques conduisent à la reproduction de ce phénomène, surtout au sein des milieux sociaux les plus pauvres et les plus marginalisés».

Disparités flagrantes dans l’enseignement

Le taux élevé de mariage précoce en milieu rural est conséquente d’un autre fléau, et non des moindre. Il s’agit du manque d’accès à l’éducation. L’Observatoire national du développement humain (ONDH) note dans ce sens une autre forme de discrimination. En effet, les femmes et les filles issues de ménages ruraux pauvres sont plus discriminées par rapport aux femmes urbaines aisées, notamment en termes d’accès à l’éducation. «L’analphabétisme est deux fois plus élevé chez les femmes pauvres en milieu rural. Ces femmes enregistrent un taux de privation de l’ordre de 55,7%, alors que les femmes citadines les plus aisées ont un taux de privation situé à 25,5%», révèle l’ONDH. À noter que les femmes rurales les plus pauvres de la région Fès-Meknès enregistrent un taux de privation élevé (61,2. Ce niveau dépasse le taux de privation des femmes rurales les plus pauvres (55,7%) de près de 5 points. Le non-achèvement des cycles primaire, collégial et qualifiant est largement plus important pour les femmes rurales que pour les femmes urbaines. Ainsi, «les femmes rurales les plus pauvres ont un taux de privation de l’ordre de 73,5% alors que les femmes urbaines les plus aisées sont privées à hauteur de 38,1%», précuise le rapport de l’ONDH.

Pour ce qui est du non-achèvement du cycle collégial, l’étude révèle que les femmes rurales les plus pauvres représentent un taux de privation de l’ordre de 91,1%, tandis que les citadines les plus aisées ont un taux de privation qui se situé à 44,7%. Pour le cycle secondaire qualifiant, les femmes rurales les plus pauvres enregistrent un taux de privation de l’ordre de 97,1% contre 61,2% pour les citadines les plus aisées. Selon l’ONDH, «les discriminations inter-sectionnelles d’accès à l’éducation sont dues à plusieurs facteurs, à savoir les difficultés d’accès aux établissements scolaires, notamment en milieu rural : insécurité, insuffisance de l’infrastructure routière, etc. Ces facteurs, qui impactent fortement la qualité de l’offre scolaire, sont source de décrochage scolaire. Les femmes dans le milieu rural en sont alors les plus défavorisées que celles des zones urbaines.

Plus de 20% des femmes rurales privées de consultations prénatales

Sur le plan sanitaire, les inégalités d’accès aux services de soins de qualité entre les femmes dans le milieu rural et celles vivant en milieu urbain sont très importantes. «En milieu urbain, près de 22,7% des femmes ne bénéficient pas d’une consultation médicale contre 37,3% pour les femmes dans le rural. Les femmes rurales les plus pauvres ont un taux de privation de l’ordre de 47,8% tandis que les citadines les plus aisées ont un taux de privation autour de 13,6%», alerte l’ONDH. «Il est aussi important de signaler qu’en milieu urbain, quelque 4,1% des femmes ne bénéficient de consultations prénatales alors que dans le rural, ce taux est de l’ordre de 21,5%, soit un dépassement de presque 424%», souligne l’Observatoire National du Développement Humain.

E. D.

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